La production de viande bovine repart en arrière

Les abattages de gros bovins finis devraient diminuer de 2,5% dans l’UE en 2019, après avoir augmenté de 2,6% en 2018, selon FranceAgriMer. Le Brexit et la Pologne sont à surveiller.

Dans un rapport mis en ligne le 6 février, l’office français des produits agricoles et de la pêche (FranceAgriMer) dresse le bilan de l’année 2018 dans les productions animales (viandes et laits) à l’échelle nationale, européenne voire mondiale. II esquisse également des prévisions pour 2019 en ce qui concerne les produits carnés.

Les abattages de gros bovins finis dans l’Union européenne (UE) ont totalisé 6,97 millions de tonnes équivalent carcasse (Mtéc) en 2018 (+2,6%) et sont projetés à 6,79 Mtéc en 2019 (-2,5%). « La question phare de l’année 2019 en ce qui concerne l’UE, qui va redistribuer les cartes au niveau du commerce intra comme extra-UE, est de savoir si le Royaume-Uni va sortir de l’UE (Brexit) et, si sortie il y a, si cette sortie se fera avec ou sans accord (« Brexit dur » dans le cas où aucun consensus n’est voté) », souligne FranceAgriMer.

L’Irlande face au Brexit

« Concernant le secteur de la viande bovine et en envisageant un Brexit dur, les Irlandais seraient les premiers touchés. En effet, ceux-ci envoient actuellement près de 50% de leur viande bovine vers la Grande-Bretagne. L’Irlande est également le premier client du Royaume-Uni concernant la viande bovine. Bien qu’une aide de l’UE soit très probablement accordée à ce pays en cas de désaccord, l’Irlande devrait tout de même restructurer en profondeur ses relations commerciales, et notamment celles liées aux échanges de produits agricoles. D’autres pays, clients ou fournisseurs du Royaume-Uni, seraient également touchés par un potentiel Brexit dur. »

« Autre fait pouvant être marquant pour 2019, la production polonaise de viande bovine devrait plafonner voire légèrement décroître, selon les prévisions de l’Institut polonais d’économie agraire IERIGZ. La stabilisation de la production de jeunes bovins polonais au 2e semestre 2018, due à la crise économique turque et dont les effets se sont ressentis à partir de l’été 2018, pourrait perdurer (et donc les envois de viande bovine polonaise ne pas reprendre à un rythme normal). Mais la Pologne a déjà recentré ses expéditions, notamment vers l’Allemagne et l’Italie, ce qui n’est pas sans risques pour d’autres pays de l’UE comme la France, qui compte ces deux pays comme des clients historiques », rappelle FranceAgriMer.

France : remontée du cours de la vache O

En France aussi, les abattages de gros bovins finis ont augmenté en 2018 (+1,6% à 1,29 Mtéc) et devraient refluer en 2019 (-3,5% à 1,24 Mtéc). Une évolution très proche de celle attendue par l’institut de l’élevage : – 4 %) « Concernant les broutards, les stocks, bien que légèrement supérieurs à ceux de 2018, devraient rester assez faibles, prévoit FranceAgriMer. En effet, les naissances de veaux allaitants ont légèrement progressé en 2018 comparé à 2017 mais cette année 2017, rappelons-le, était une mauvaise année pour les naissances de veaux. Du côté de la demande, le marché italien devrait être stable mais, du côté espagnol, si les situations en Turquie et en Libye ne s’améliorent pas, la demande en broutards français devrait rester très basse, ce qui pourrait provoquer un encombrement du marché. Le marché algérien devrait ouvrir à nouveau, ce qui allégerait le marché français, mais trop partiellement si rien ne bouge en Espagne. »

« Le cheptel se sera ajusté aux stocks de fourrages prévus pour l’hiver 2018/2019 et les réformes laitières devraient donc arriver sur le marché de la viande de façon bien moins importante qu’en fin d’année 2018. Cela pourrait permettre aux cours des vaches O de remonter. Du côté des femelles allaitantes, la question est de savoir si le phénomène de décapitalisation se poursuivra, celui-ci dépendant a priori de facteurs multiples (abattages de vaches, naissances, entrées de primipares en production, agrandissements des élevages, problèmes de reprise des exploitations…). Le marché du jeune bovin (JB) devrait se désengorger en 2019 si les envois vers les pays du pourtour méditerranéen reprennent à des niveaux corrects. En effet, le surplus d’offre en 2018 provenait essentiellement de la baisse notable des exportations de JB français vers ces pays méditerranéens, face à la concurrence accrue de l’Espagne voire de pays d’Amérique du Sud, plus compétitifs que la France sur ce marché. La portée des exportations de ces pays concurrents vers les principaux clients de la France en bovins finis définira donc le sort des envois de JB français et, par conséquent, de l’état d’encombrement de ce marché en 2019. »

Consommation en hausse, mais des carcasses peu adaptées

« Après la sécheresse estivale de 2018, la situation des cheptels allaitants comme laitiers en 2019 dépendra étroitement de l’arrivée du printemps et des premières pousses d’herbe. Concernant la viande bovine, les exportations devraient se maintenir si la production nationale en Italie ne poursuit pas sa forte hausse et si la situation en Grèce ne la pousse pas à s’approvisionner majoritairement auprès d’autres pays, particulièrement des pays d’Europe de l’Est. Les importations de viande bovine devraient quant à elle rester à un niveau élevé, compte-tenu du déséquilibre offre-demande en France, en termes notamment de dimensionnement des carcasses pour la restauration hors domicile. La consommation par bilan pourrait continuer de croître ou se stabiliser par rapport à 2018 si l’attrait des Français pour la viande bovine, ou toute sorte de plat en contenant, perdure et n’est pas, par exemple, entamé par les nombreux discours anti-viande. »

L’UE a été autosuffisante en viande bovine en 2018 (taux : 100,6 %, hors veau). La consommation par bilan de l’UE à 28 a progressé de 3,3% (+ 225 000 téc) ; en y incluant la viande vitelline, la hausse a été de 5,1%. La consommation par habitant est en moyenne de 14,8 kg/an (inclus viande de veau), soit 0,7 kg de plus qu’en 2017. « La hausse de la production indigène brute de gros bovins (+2,6%) ainsi que celle des importations de viande bovine (viande de veau incluse), à hauteur de 10,2%, ont accru les disponibilités », analyse FranceAgriMer.

Benoît Contour

A télécharger : Bilan 2018 et perspectives 2019 des produits carnés et laitiers (FranceAgriMer, février 2019)

A lire également : Moins de vaches réformées en 2019 (Institut de l’élevage, 28 janvier 2019)

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