« Les abattages systématiques ne sont plus acceptables »

L’OABA (Oeuvre d’Assistance aux Bêtes d’Abattoirs), association de défense des animaux, dénonce comme les éleveurs l’abattage systématique des cheptels atteints par la Dermatose nodulaire contagieuse. 

Ce matin-là, au siège du CNOPSAV, la tension est palpable. Dans les couloirs, les discussions vont bon train avant même l’ouverture de la séance. Vétérinaires, représentants d’éleveurs, associations de protection animale, hauts fonctionnaires… Tous savent que la réunion du jour ne ressemble pas aux autres. Depuis plusieurs semaines, la Dermatose Nodulaire Contagieuse (DNC) continue sa progression. Et chacun attend une décision claire du gouvernement. Ou au moins un cap. L’OABA, qui siège aussi au nom du Conseil National de la Protection Animale, espérait beaucoup de cette rencontre. C’est elle qui avait publiquement demandé la convocation d’un « Parlement de l’élevage », tant l’inquiétude grandissait sur le terrain. Mais à l’issue de plus de deux heures d’échanges, l’impression dominante est celle d’un rendez-vous manqué.

La ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, a bien présenté trois scénarios. Un arrêt de la vaccination, un maintien du dispositif actuel ou une extension plus ambitieuse des injections. Mais au lieu d’un arbitrage, les participants ont assisté à un simple tour de table où chacun a exposé ses réserves, ses craintes ou ses hésitations. La décision est finalement renvoyée à janvier. Une annonce accueillie avec un mélange de frustration et d’incrédulité.

Une vaccination généralisée

Dans les rangs de l’OABA, la déception est profonde. L’organisation demande depuis six mois une vaccination généralisée afin de prévenir l’abattage de troupeaux entiers. Elle estime que la fenêtre hivernale représente un moment unique pour agir, avant une possible reprise de la maladie au printemps. Mais ce matin, même si plusieurs voix ont soutenu la vaccination élargie, elles ont été minoritaires. « On parle, mais on ne décide pas », confie un participant qui ressort abasourdi de la salle. Pendant que les discussions patinent dans les bureaux parisiens, la réalité est bien différente dans les élevages. Depuis plusieurs semaines, des abattages préventifs sont ordonnés dès qu’un cas est détecté. Des vétérinaires doivent annoncer à des exploitants qu’ils vont perdre des animaux sains, faute d’alternative validée. Certains témoignent d’un malaise grandissant. D’autres racontent l’incompréhension des éleveurs, qui voient arriver les camions d’équarrissage alors que la vaccination est disponible, et largement approuvée par la profession.

Ça patine à Paris

Un moment a particulièrement cristallisé l’agacement. Lorsque la question d’un abattage partiel a été soulevée, la ministre a coupé court à l’échange. La position officielle tient en une phrase : les bovins vaccinés peuvent rester porteurs, donc tout le troupeau doit partir. Pour l’OABA, cette justification ressemble davantage à une logique d’administration qu’à une réflexion sanitaire fine. L’association rappelle que les animaux sont reconnus par le Code civil comme des êtres sensibles et que cette dimension devrait entrer pleinement dans la décision publique.

L’ironie de la situation, notent plusieurs experts, tient au calendrier lui-même. Nous sommes dans une période où la circulation virale ralentit et où la vaccination pourrait être déployée efficacement. Pourtant, alors même que les conditions sont réunies, aucun choix stratégique n’est acté.

« C’est comme voir la tempête arriver et décider de reparler des volets plus tard », glisse, amer, un vétérinaire présent à la réunion.

Pour l’OABA, la ligne reste inchangée. L’organisation continuera de plaider pour que la vaccination remplace l’abattage massif, au nom de la cohérence sanitaire, du respect du vivant et de la stabilité d’une filière déjà fragilisée. En attendant, la France reste dans l’expectative. Et la maladie, elle, n’attendra pas le mois de janvier pour continuer sa route.

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