Petite unité, grande efficacité

Depuis avril 2018 et son raccordement au réseau public Enedis, la petite unité de biométhanisation agricole du Gaec de Sablonné à Villeperdue (Indre-et-Loire) tourne à 100 % de ses capacités. Mise au point par le constructeur wallon CogeO et le mayennais CRD, elle démontre que la petite méthanisation de lisier (50 kWél) est non seulement techniquement possible mais qu’elle est également rentable.

« Nous ne nous sommes pas trompés », déclare simplement Grégory Declerck, au moment d’effectuer un premier bilan de son unité de méthanisation. En ce début de printemps, l’installation de 50 kWél vient tout juste de fêter sa première année de fonctionnement. « Depuis notre raccordement au réseau, nous avons produit 329 000 kW rachetés 0,225 €/kW (soit près de 75 000 €). Désormais, la méthanisation nous permet de boucler le cycle de l’élevage et de valoriser au mieux les déjections animales ».  Au total, Le Gaec a investi 500 000 € dans cette installation. Les exploitants jugent ce nouvel atelier fort rentable pour l’entreprise : un bon investissement qui, de plus, est peu coûteux en main-d’œuvre. Chaque jour, ils valorisent ainsi 10 à 12 m3 de fumier mou raclé (13 % de matière), produit par leurs 160 vaches laitières conduites en logettes paillées (apport de 2,5 kg de paille/vache/jour). À ces déjections animales, ils ajoutent environ 5 m³/jour d’eau de dilution (eau de lavage de la salle de traite et jus de fumière) et 150 kg/jour d’issues de céréales. « Si tout va bien, cela ne demande que 10 minutes de travail, poursuit Grégory Declerck. Les visiteurs ont parfois du mal à le croire mais c’est pourtant vrai. Le système d’incorporation a demandé quelques mises au point mais, aujourd’hui, tout fonctionne bien. D’ailleurs, nous n’aurions pas pu y consacrer plus de temps. Notre quotidien est déjà bien chargé. Nous avons préféré cette installation plus petite à un investissement collectif ou plus grand qui aurait nécessité de recruter des salariés ou qui aurait posé des questions en matière de responsabilité en cas de problème ».

Synchronisation des racleurs et du collecteur

Le fumier pailleux collecté par les racleurs à cordes conçus par l’entreprise mayennaise CRD tombe dans une préfosse. Ces équipements passent toutes les 2 heures dans la stabulation. La propreté des vaches est par ailleurs assez frappante. Après l’ajout d’eau, le mélange est ensuite homogénéisé par un mixeur d’une puissance de 18,5 kW, puis aspiré par une pompe de la même puissance. Tout est automatisé. Les appareils de collectes du lisier et du fumier ont été synchronisés entre eux pour éviter qu’une grande quantité de fumier n’arrive en même temps dans la préfosse. Les racleurs s’arrêtent 2 m avant l’arrivée dans la préfosse pour que le fumier soit collecté facilement par l’évacuateur. Leur vitesse est réduite en fin de cycle pour permettre au mixeur et à la pompe de ne pas se boucher. Afin de réduire les problèmes de maintenance, la pompe est fixée sur une potence et un palan permet de la remonter en quelques minutes. Tout le dispositif a été conçu pour réduire au maximum les pertes de temps. La pompe broyeuse et le mixeur permettent de broyer au mieux la paille augmentant du même coup le pouvoir méthanogène du prémix. La préfosse est également une assurance de bon fonctionnement du digesteur. Les cailloux ou corps étrangers tombent par gravité au fond de la fosse et ne pourront pas entrer dans le méthaniseur. Au final dans l’installation du Gaec de Sablonné, la pompe joue le rôle de fusible de sécurité de l’installation. Si elle se bloque avec de la paille, le premix ne peut pas entrer dans le digesteur et l’éleveur doit alors intervenir.  

« Notre entrepreneur va investir dans un rotocut pour broyer et défibrer la paille plus finement afin de régler les petits problèmes rencontrés au niveau de la préfosse  ». L’éleveur paille tous les deux jours. Plus de la moitié de la paille est collectée lors du premier raclage après le paillage. Le premix séjourne en moyenne 48 heures dans la préfosse. Au fil des mois, l’exploitant maîtrise de mieux en mieux le dispositif. Il dilue ainsi plus ou moins son premix qui est ensuite envoyé dans l’unité de méthanisation. Le digesteur consiste en une cuve en béton d’un diamètre de 12,5 m pour une hauteur de 5 m, soit un volume utile de 560 m³. Le moteur de cogénération est un moteur MAN développant une puissance de 50 kWél ou 84 kWth. Entre le digesteur et le moteur se trouvent un filtre à charbon actif et un filtre H2S biologique externe permettant de réduire de 80 % la consommation de charbon actif. Le concepteur de l’unité a cherché à simplifier au maximum les opérations de maintenance. Installé dans un conteneur avec l’ensemble des armoires électriques, le moteur posé sur des silentblocs et protégé par un caisson isolant reste étonnamment peu bruyant.

Un séparateur de phase à tamis

Jusqu’à présent, la vidange du moteur est réalisée par l’éleveur tous les 14 jours, ou plus précisément toutes les 400 heures. Celui-ci vient toutefois de signer un contrat de maintenance avec une société extérieure. Le digestat est retraité par un séparateur de phase à tamis vibrant conçu par CRD. Le stockage du digestat liquide intervient dans la fosse existante alors que la partie solide reste au niveau de la fumière. Cette année, l’exploitant a épandu le digestat et a ainsi économisé l’achat d’engrais minéraux pour plus de 25 ha de cultures et notamment les prairies. « Les parcelles de ray-grass sont très belles », constate Grégory Declerck. Ce dernier valorise également une petite partie de la chaleur produite par l’unité de méthanisation au niveau de la laiterie, le bâtiment est ainsi hors-gel. « Nous n’avons pas eu de soucis de production au niveau du digesteur. Il nous faut toutefois faire attention aux produits de traitement des pathologies du pied. Impossible en effet de miser sur des biocides pour soigner les boiteries car ils risqueraient de détruire la population microbienne du digesteur ».

ELD

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