L’industrie d’abattage-découpe est confrontée à une pénurie d’animaux qui n’a pas encore entaché sa rentabilité. Pour combien de temps ?
L’industrie de la filière bovine a connu, en 2021, une « croissance forte comparée à l’historique » avec un chiffre d’affaires en hausse de 5,6 % par rapport à 2020, indique l’Observatoire de la filière viande du Crédit Agricole (janvier 2023). « Cela provient essentiellement d’un effet prix avec la forte revalorisation de la viande bovine en 2021. En effet, la tendance forte à la décapitalisation du cheptel bovin français a peu à peu généré un déséquilibre important entre l’offre de bovins à abattre et la demande en viande bovine. Les abattoirs sont en recherche de bovins et ce déséquilibre est synonyme de prix élevés. »
« En marche depuis plusieurs années par manque d’attractivité de la filière, la décapitalisation du cheptel bovin français entraîne depuis presque deux ans un manque préoccupant de bovins à abattre pour les industriels. Ces derniers, contraints, s’ils veulent se maintenir, de saturer leur outil industriel, sont amenés à revoir leur fonctionnement (nombre de jours ouvrés) et à faire preuve d’inventivité pour s’assurer d’approvisionnements durables (contrats, partenariats). Pour s’adapter aux changements de fondamentaux de marché, il est probable que les modèles de filières évoluent structurellement. »
« Toujours est-il que le déséquilibre actuel entre l’offre en bovins et la demande des abattoirs – et des consommateurs – entraîne le maintien des prix des carcasses à des niveaux historiques, tant au niveau du cheptel allaitant que du cheptel laitier. Au total, en termes de chiffre d’affaires, la baisse attendue des volumes de production des industriels sera, en apparence, plus que compensée par la hausse généralisée des prix au sein de la filière. Reste à savoir à quel moment cette hausse deviendra un frein pour les consommateurs, déjà tentés par le report vers les produits naturellement moins chers, tels que le porc. »
3 % de marge
En 2021, « la filière bovine a tiré profit, sur le plan de la marge, d’un déséquilibre important entre l’offre et la demande en Viande Bovine Française (VBF). L’EBITDA (1) moyen des industriels bovins & multi-espèces représente aujourd’hui plus de 3 % du chiffre d’affaires. Si cela reste faible, comparé aux industries agroalimentaires en général, c’est un niveau plutôt élevé pour le métier d’abattage. » Dans cette filière, « la situation financière apparemment très satisfaisante est liée aux situations avantageuses des leaders, mais aussi à un recours structurellement difficile à l’endettement chez un certain nombre de plus petits acteurs. »
En 2020 et 2021, la rentabilité économique des capitaux investis dans la filière bœuf + multi-viandes a approché 8 %, un chiffre supérieur à celui des années précédentes. Ainsi le ROCE (2) de la filière se maintient-il à « un niveau élevé pour le secteur, grâce à de bonnes performances d’exploitation », note encore le Crédit Agricole.
BC
(1) L’EBITDA est le solde entre les produits d’exploitation et les charges d’exploitation qui ont été consommées pour obtenir ces produits.
(2) Le ROCE mesure le rapport entre l’accroissement de richesses et les capitaux investis, soit la rentabilité économique des actifs mobilisés.
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A télécharger :
Bulletin hebdomadaire des filières ruminants (Interbev, 15 février 2023)
Bulletin hebdomadaire des filières ruminants (Interbev, 8 fév. 2023)
Fiche filière viande bovine (FranceAgriMer, 2 février 2023)
Fiche filière veau de boucherie (FranceAgriMer, 2 février 2023)
Bulletin hebdomadaire des filières ruminants (Interbev, 1er fév. 2023)
Les prix agricoles ralentissent mais restent élevés (ministère de l’agriculture, 31 janv. 2023)
Note de conjoncture viandes rouges (FranceAgriMer, 30 janvier 2023)
Note de conjoncture lait de vache (FranceAgriMer, 30 janvier 2023)
12 mois consécutifs de baisse des abattages (ministère de l’agriculture, 27 janv. 2023)
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